Déjà deux épisodes de disponibles sur Disney + et le trouble est bien présent par rapport à la direction scénaristique choisie. L’introduction des personnages est efficace, en particulier Steven Grant/Marc Spector qui pousse la dualité du personnage dans ses retranchements en misant à fond la carte du trouble dissociatif de l’identité. La voie royale pour Oscar Isaac qui laisse éclater à l’écran ses interprétations des deux personnages, avec finesse et subtilité. Ethan Hawke, très convaincant en Arthur Arrow, gourou charismatique au service de la divinité égyptienne à tête de crocodile Ammit chargée de juger l’ame des morts pour leur permettre d’accéder à l’au-dela. Ici, Arrow utilise le « jugement » d’Ammit sur ses fidèles, dispensant le droit de vie et de mort selon les actes passés, présents et futurs de la personne jugée. Une préscience du bien et du mal qui n’est pas sans rappeler le projet « insight » introduit dans Captain America: Le soldat de l’hiver, qui permettait au SHIELD de neutraliser des cibles qui représentaient potentiellement une menace, parfois même sans le savoir. Un air de déjà-vu, camouflé par l’aspect mystique des événements qui n’empêche pas ces deux épisodes introductifs d’être le meilleur démarrage d’une série Marvel/Disney+ jusqu’à présent.

Il n’en demeure pas moins dommage de constater que la série, Disney oblige, édulcore à l’extrême un personnage réputé pour sa violence graphique brute et sauvage. Bien que, tous les choix artistiques et scénaristiques soient bons et très convaincants, on est encore une fois sur une production tous publics, avec des combats très lisses, voire carrément hors-champs, en témoigne le combat contre la créature que l’on ne voit pas, une économie de budget déguisée en trouvaille de mise en scène au final assez pauvre.

De plus, l’utilisation de créatures de synthèses permet de faire de cette version de Moon Knight un avatar de Khonshu très « kids friendly », qui ne donnera pas de cauchemar à vos petits bambins. Même si les bebetes peuvent avoir l’air effrayant, faites l’effort de lire les comics dessinés par David Finch pour faire la différence. Le vrai Moon Knight casse des bouches et éparpille ses adversaires façon puzzle, et pas seulement sur des bestioles venues d’autres dimensions. Le traitement réservé à Bushman ,dans les comics, reste dans mon top ten des moments traumatisants chez Marvel.

Outre la violence qui fait cruellement défaut à cette version du personnage, la série à le mérite d’avoir saisie et accentuée la psyché fragile Grant/Spector pour en faire un véritable pivot scénaristique autour duquel se greffe les doutes et cas de conscience de chacun des intervenants, à commencer par Khonshu qui en vient à douter de l’efficacité de Marc pour continuer de servir sous ses ordres. Espérons que ce doute ne se transforme pas simplement en passage de flambeau, car Khonshu semble avoir quelques espoirs misés sur le personnage de Layla, qui efface maladroitement la Marlene des comics, et serait selon toutes vraisemblances Layla Miller, personnage secondaire des comics qui a son importance dans l’arc House Of M. Possible également, que le show croise le récit du Strange et son multiverse à venir, car Layla obtient la faculté, entre autres pouvoirs, de rétablir les souvenirs perdus ou altérés. Chose qui serait bien utile à Steven Grant. Tout cela n’est pour le moment que pure spéculation, reste à espérer que le résultat sera à la hauteur du personnage.

Connaissant les directions prises par Disney pour casser les codes préétablis par des années de culture comics centrées en grande partie sur des personnages masculin, il n’est pas impossible de voir Layla devenir le nouvel avatar de Khonshu, agrémenté de pouvoirs mutants supplémentaires. Des craintes amplifiées par la nature du contrat signé par Oscar Isaac qui ne le lie au personnage que pour cette saison. Tout cela n’empêche pas cette version soft de Moon Knight d’être un excellent divertissement, stylé et très relativement proche de son homologue des comics, qui se veut être un croisement de Batman et du Punisher.