Quand on parle d’un film de Pedro Almodovar, on imagine souvent la sulfure, le scénario aux petits oignons et la direction d’acteur qui embellit un scénario souvent axé sur l’amour et les relations humaines. Le cinéaste de 71 ans est très apprécié des Espagnols et a obtenu de nombreuses distinctions cinématographiques d’envergure (Oscars, prix au Festival de Cannes, Goyas…). C’est lui aussi qui a fait de Pénélope Cruz et d’Antonio Banderas des superstars internationales. La majeure partie de ses longs-métrages restent des messages ouverts sur la société d’aujourd’hui. De la déviance du progrès dans La Piel que Habito (2011) à l’amour maternel avec Julieta (2016), Almodovar traite de thématiques qui se perçoivent sous un angle profondément humain.
Pedro Almodovar s’ouvre continuellement sur toutes les formes d’arts et propose sans cesse des longs-métrages prônant l’inclusivité. Très en avance sur son temps, il multiplie les personnages différents, pour que toutes les communautés puissent être représentées. Tout sur ma mère (1999) met en scène une prostituée transsexuelle, une religieuse enceinte et une actrice lesbienne ; Parle avec elle (2002) introduit une femme Matador.
Les thématiques du cinéaste s’inspirent aussi du genre horrifique. Mais sa vision de l’horreur s’inscrit toujours dans notre propre réalité et dans notre quotidien de la vie de tous les jours. La Piel que Habito aborde notamment la question de la chirurgie, sous un prisme résolument glauque. Almodovar prend un malin plaisir, malgré ses efforts pour s’adresser à tous, de choquer et déstabiliser son spectateur.
C’est pour cela qu’il ne faut pas s’arrêter à une comparaison basique entre un film d’Almodovar et un film sulfureux à la limite de l’érotisme mal placé. Les limites de la bienséance sont faites pour marquer l’esprit du spectateur et dénoncer les comportements déviants et malhonnêtes de notre société. Les antagonistes de La Piel que Habito sont presque tous des hommes, mais ces derniers ne tombent jamais dans la caricature.
Seulement, comme Pedro Almodovar semble être le ponte du cinéma Espagnol, seul lui bénéficie d’une médiatisation notable, et nombreux sont les cinéastes d’auteurs Hispaniques à passer à la trappe. Par exemple, Cesc Gay et son Truman de 2016 est une véritable ode à l’amitié et prends véritablement à contre-pied la mise en scène polémique des narrations d’Almodovar.
Sauf que le long-métrage avec l’impérial Ricardo Darin n’aura pas franchement enthousiasmé les foules malgré une pléiade de Goyas. Il est bon à notifier toutefois que si les films d’Almodovar sont avant tous passés par une phase « d’étude de l’amour » puis « d’étude de la filiation mère-fille » ; « de portrait de la femme forte » puis de genre horrifique, le cinéaste semble prêt à effectuer un melting-pot de toute sa filmographie, un peu comme Quentin Tarantino et Once Upon A Time In Hollywood. En effet, l’ultra-acclamé Douleur Et Gloire (2019) effectue un chassé-croisé de toutes ses thématiques fétiches.