C’est une critique particulière que nous vous présentons aujourd’hui. En effet, elle concerne le second film d’animation du DC Universe Animated Original Movies, « La Ligue des Justiciers : Nouvelle Frontière », qui est une adaptation du chef-d’oeuvre « DC : The New Frontier » de Darwyn Cooke, le talentueux dessinateur et scénariste décédé le 14 Mai 2016 à l’âge de 53 ans.
Darwyn Cooke faisait assurément partie des meilleurs artistes du monde des comics. Nous lui devons les comics
Batman : Ego,
Before Watchmen : Minutemen,
Catwoman,
Solo DC Comics,
Spirit,
Superman Confidential et, bien sûr, son oeuvre inoubliable
DC : The New Frontier. En plus d’avoir remporté de nombreuses récompenses pour bon nombre de ses comics, il a également reçu le Prix Eisner, le Prix Harvey, le Prix Joe Shuster et le Prix du Comic Book de la National Cartoonists Society pour son travail sur
DC : The New Frontier. Il avait également travaillé dans le domaine de l’animation, notamment sur le mythique épisode «
Légendes du Chevalier Noir » de la
série animée Batman, ainsi que sur la réalisation de quelques épisodes de la série animée
Men in Black et sur les storyboards de
Batman La Relève.
Pour revenir à l’adaptation de «
La Ligue des Justiciers : Nouvelle Frontière« , sorti le 26 Février 2008 aux Etats-Unis et en 2017 en France (il était grand temps !), il s’agit d’un film d’animation réalisé par
Dave Bullock, qui a notamment travaillé sur les séries animées
Superman,
Batman la Relève,
The Batman,
La légende de Tarzan et
Justice League Unlimited, en plus d’avoir apporter son talent sur quelques comics. Le scénario est adapté par
Stan Berkowitz, qui a officié sur les séries
Superboy et
Hooker, les séries animées
Batman,
Superman,
Spider-Man,
Batman la Relève,
La Ligue des Justiciers,
Static Shock, ainsi que sur les films d’animations
Batman Superman : World’s Finest et
Superman/Batman : Public Enemies. Rappelons que
Darwyn Cooke a également été consultant et producteur sur cet ambitieux long-métrage animé.
À la fin des années 50, le Maccarthysme a forcé la plupart des
super-héros à prendre leur retraite. De leur côté,
Superman et
Wonder Woman travaillent pour le gouvernement américain, tandis que
Batman continue malgré tout d’oeuvrer dans l’illégalité, tout comme
Flash. Au début du long-métrage, nous assistons aux origines du
Martian Manhunter, au background de
Hal Jordan, futur
Green Lantern, et à une divergence d’opinions entre
Superman et
Wonder Woman en Indochine, pendant la fameuse guerre qui avait fait rage dans ce pays.
Diana a délivré des femmes qui avait été violées et enfermées par les rebelles dans un petit village. Ces derniers, qui n’avaient pas supporté l’aide des villageois apportée aux soldats français, ont également tué maris et enfants. En délivrant ces pauvres femmes meurtries,
Diana a laissé les armes des rebelles entre leurs mains afin qu’elles puissent assouvir leur vengeance contre eux.
Superman tente de lui faire comprendre qu’agir de la sorte fait d’eux des justiciers, un comportement qui a pourtant été interdit par le gouvernement qui les emploie.
Comme vous pouvez le constater en lisant ces lignes, l’adaptation n’édulcore en aucun cas le récit d’origine, et il en est de même pour la violence, qui ne dissimule pas la vue du sang dans certaines scènes. Tout comme l’a dessiné Cooke dans le comics, le costume de Superman reprend celui des chef-d’oeuvres animés produit par les studios Fleischer des années 40 (ingénieuse idée), avec le fameux symbole S sur fond noir. Quant au costume de Batman, lui aussi est fidèle aux illustrations de l’artiste, qui avait repris le costume et la batmobile des tout premiers comics du Chevalier Noir en 1939, et il en est de même pour les autres super-héros qui sont vêtus de leur costumes originaux de l’âge d’or DC. Malgré quelques raccourcis évidents pour long-métrage animé de 71 minutes, la trame scénaristique initiale est respectée, ainsi que les psychologies des personnages.
Voir ce qui symbolise le charme des années 50 dans un film du
DC Universe Animated Original Movies est un réel plaisir, de l’architecture de l’époque aux transistors, téléviseurs, véhicules, coiffures et tenues vestimentaires. La composition musicale de
Kevin Manthei (Les
jeux vidéos Panzer General 2,
The Next Tetris,
Silent Hunter 2,
Pitfall,
Disney Infinity 3.0) s’adapte à merveille sur cette ambiance et ce récit, nous livrant même de petites notes de jazz dignes d’un film noir lorsque le film prend un court instant une allure « pulp » dans la nouvelle vie nocturne du
Martian Manhunter, qui tente de s’adapter à notre monde en se transformant en être humain vêtu d’un chapeau et d’un imperméable. Concernant l’animation, bien qu’elle ne retranscrive pas le style de
Cooke à 100 % (bien qu’elle tente de s’en rapprocher, initiative que nous saluons), elle s’avère tout simplement sublime et détaillée. Il en va de même pour la colorimétrie. «
La Ligue des Justiciers : Nouvelle Frontière » est probablement LE film d’animation
DC à jouir d’une authentique utilisation de la couleur, extrêmement proche de la perfection, que nous devons au coloriste
Craig Cuqro (
Godzilla : The Series,
Men in Black : The Series,
Superman/Doomsday,
Batman vs Two-Face).
Pour la distribution originale, nous retrouvons la présence de quelques talents :
Martian Manhunter :
Miguel Ferrer (
RoboCop,
Twin Peaks,
Revenge,
Hot Shots 2,
Preuve à l’appui,
NCIS : Los Angeles)
Flash :
Neil Patrick Harris (
Starship Troopers,
How I Met Your Mother,
Gone Girl,
Les désastreuses aventures des orphelins Baudelaire)
Le Centre :
Keith David (
Platoon,
Road House,
Gargoyles,
Princesse Mononoké,
Armageddon,
Spawn,
Requiem for a dream,
La princesse et la grenouille)
Ace Morgan :
John Heard (
Big,
Maman, j’ai raté l’avion,
L’affaire Pélican,
Snake Eyes,
Pollock,
Prison Break)
Wonder Woman :
Lucy Lawless (
Xena la guerrière,
Spider-Man,
Battlestar Galactica,
Spartacus,
Ash vs Evil Dead)
Superman :
Kyle MacLachlan (
Twin Peaks,
Showgirls,
How I Met Your Mother, Marvel : Agents of S.H.I.E.L.D)
Carol Ferris :
Brooke Shields (
Susan !,
Nip/Tuck,
Very Bad Cops)
Batman :
David Boreanaz (
Buffy contre les vampires,
Angel,
Mortelle Saint Valentin,
Bones)
Le visionnage de ce long-métrage animé et la relecture du comics éveillent un réel désir de voir un jour une adaptation live du merveilleux récit de Darwyn Cooke, qui est à classer, sans nul doute, parmi les 30 meilleurs comics et graphic novels que cette industrie nous ait livré. Après tout, DC Films a pour projet de créer une gamme de films extérieurs à son univers cinématographique, tels ses projets sur les origines du Joker transposées dans les années 80, ou encore Superman Red Son que le studio comptait adapter (bien que depuis quelque temps, le projet semble plutôt prendre le chemin du DC Universe Animated Original Movies). Si les pontes de Warner Bros avaient plus d’attributs entre leurs jambes que dans leur portefeuille, ils seraient tout à fait capable de permettre à la branche DC Films d’adapter soigneusement de telles oeuvres, tant les Elseworlds des comics DC sont riches.
En conclusion, nous avons ici l’une des adaptations les plus ambitieuses et les plus réussies du DC Universe Animated Original Movies. Mention spéciale à la colorimétrie, au charme des années 50 et à cette rencontre parfaitement retranscrite des super-héros de l’âge d’or et de l’âge d’argent, même si un récit en deux parties tel « The Dark Knight Returns » aurait été bienvenu afin d’avoir une authentique liberté d’adaptation tant le comics original est un chef-d’oeuvre de richesse. Malgré cela, visionner cette adaptation soignée d’un des meilleurs récits de DC Comics reste un pur moment d’authenticité, qui nous fait oublier la médiocrité de quelques adaptations live saccagées par Warner Bros.
9/10