Dans l’industrie du Jeu de Rôle certains noms ont une place à part, « In Nomine Satanis/Magna Veritas » en fait forcément partie. Jeu français, paru en janvier 1989 ce qui ne nous rajeunit pas, propose de faire jouer des groupes de Démons au service de Princes démons ou d’anges au service d’Archanges, envoyés sur Terre pour influer sur Le Grand Jeu, celui des âmes humaines tendant à faire pencher la balance dans le camp du Très haut ou du Seigneur des enfers…
Avez-vous déjà entendu parler de notre Seigneur…
Vous vous dites d’ores et déjà que ce jeu n’est pas fait pour vous tant vos cours de catéchisme vous paraissent loin, rassurez-vous ce jeu est pour tout le monde et à prendre s’il vous plait au deuxième degré. Lorsque vous ouvrez pour la première fois les pages de INS/MV plusieurs choses sont à remarquer… Vous devez choisir un camp, en effet les âmes des humains devront être envoyées chez vous, mais qu’en est-il de ce chez vous ? Une fois le choix cornélien du « Bien » ou du « Mal » assumé vous rencontrerez une pléthore de Princes Démons et Archanges tous plus déjantés les uns que les autres, et serez prêts à vous jeter dans l’aventure.
Ensuite ce jeu est bourré d’humour, ne serait ce que pour la lecture du livre de base ce jeu justifie son achat (de la version 1 à 4, la nouvelle mouture étant ****ique), on prend plaisir à rire bêtement de ces anecdotes loufoques, ces pouvoirs ridicules et bien entendu sa galerie de personnages annexes, Jésus existe, il est vivant, il est barman à Paris dans un bar nommé « Chez Régis ».
Enfin, le système est simple et ne nécessite que 3d6 (trois dés à six faces pour les moldus) ou autrement dit 1d666 ! On favorise ici la fluidité et la déconne, le jeu ne présente jamais vocation à se prendre au sérieux et tient bien plus de Dogma que de toute autre représentation de l’apocalypse que vous pourriez avoir. Pour autant lorsque le combat s’engage la démesure est de rigueur, peut importe que vous abîmiez les corps que vous habitez si un ange vous attaque, jetez-lui une Clio sur la tronche devrait le calmer (voir une Fiat Multipla si vous êtes joueur). Mais l’Humanité ne devant pas être mise au courant de ce qui se trame vous ferez bien entendu tout cela dans le feutré…
Inspirations divines… ou pas !
Les Jeux de Rôles nécessitent souvent une ambiance particulière, difficile de faire peur avec le Mythe de Cthulhu si votre grand ancien se nomme Prout. L’ambiance d’une partie d’INS/MV est détendue, vos personnages ne craignent pas la mort, si le corps dans lequel ils sont en transit vient à dépérir vous en changez et rappliquez pour continuer à poncer des culs (expression approuvée par les rôlistes de 1984). Si vous séchez pour votre première expérience, de bonnes bases d’étude sont Dogma, Lucifer, The Good Place, Preacher, RIPD et de manière plus franchouillarde Ma vie est un enfer.
Le magnifique écran de Maître de la quatrième version...
Les joueurs de ma génération connaissent déjà surement INS/MV, et si ce n’est pas encore le cas ils ont au moins entendu parler de son créateur, Dieu? Non plus gros, Jack Black? Non plus français… Croc bien entendu. A l’origine des plus belles heures du Jeu de Rôle en France avec Bloodlust, Bitume ou encore COPS entre autres, ses jeux sont sans filtres, et INS/MV fait honneur à la tradition. Toutefois je ne saurais que vous conseiller de ne pas jouer à ce jeu avec tout le monde, mais en règle générale tant que vous évitez les enfants et âmes sensibles.
La petite fille de La Pocatière
Que ce soit en campagne ou en One-shot, INS/MV reste un jeu exceptionnel, tant dans son humour, sa variété de personnages hauts en couleur ou sa simplicité d’utilisation. Nombreux sont les rôlistes qui y ont passé des heures mémorables, le cadre nous offre ce qu’il faut de rigide pour baliser une aventure digne de ce nom, alors que ces âmes immortelles projetées dans des corps sans ménagement font que le personnage est doté d’une liberté malsaine, mais libératoire.
Ceci dit, le bémol de ce jeu vient malheureusement de sa dernière édition en date. Même si la 4e édition à ma préférence, j’ai dans l’ensemble toujours été fan du travail apporté à cette série et ses extensions, les dessins sont beaux et le noir et blanc permet en plus de leur rendre honneur de garder une cohérence entre les artistes, les réajustements du système sont des détails, mais qui rendent chaque fois le jeu plus jouable et fluide. Mais « Génération Perdue » édité par Raise Dead Édition pour ne pas les citer est une calamité. Le livre est vendu sous cello et pour cause, la moitié des illustrations sont dégueulasses, le système n’apporte rien après 10 ans (là ou les anciennes éditions s’étaient suivie de 5 ans), la couverture étant ce qu’il y à de plus beau, mais aussi de plus mal en propos au vu du contenu, sombre et sérieuse comme on l’attend d’un Chroniques des Féals, à croire que les illustrateurs ne savaient pas ce qu’ils illustraient… Un comble.
Enfin le pire de tous les affronts, l’univers qui se voulait le point fort de ce jeu que ce soit en tant que JDR ou en comparaison aux autres jeux de ce type est tout simplement balayé comme un étron puant pour ne faire place à rien, du vide! On sent tellement le « J’ai pas d’inspiration, mais besoin de sous » que ça en est affligeant, pour faire simple là ou un grand jeu était dépeint et ses instigateurs avait une place prédominante on nous balance un Deus Ex Machina insensé, « Vous êtes amnésiques » et démerdez-vous avec ça comme ça j’ai pas besoin d’en faire plus!
OK, je me calme, pour résumer je conseille ce jeu à tous et à toutes quant à la manière d’un Rocky ou l’on oublie que le 5 ait existé là vous passez votre chemin à l’approche de « Génération Perdue » (j’aurais pour ma part appelé cette édition « Inspiration Perdue »), mais mise à part ce faux pas ce jeu est une tuerie tout simplement, et si vous ne me croyez pas, foncez trouver l’asso de JDR la plus proche de chez vous et trouvez vous un gentil MJ (pas trop gentil tout de même) qui vous fera tester.